Le présent document vise à présenter aux membres des tribunaux administratifs quelques lignes directrices générales qui les renseigneront sur leurs obligations en matière de récusation prévues par la Loi.
Comme nous le verrons plus loin, la Loi impose comme premier critère de déterminer si l’issue de l’instance administrative présidée par le membre en question fournit la possibilité de favoriser l’intérêt personnel du membre, d’un parent ou d’un ami, ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne. Lorsque cette possibilité existe, le membre peut être tenu par la Loi de se récuser et de faire une déclaration publique à ce propos.
Règles de récusation
À titre de personnes nommées par le gouverneur en conseil, les membres des tribunaux administratifs sont considérés comme des titulaires de charge publique au sens de la Loi sur les conflits d'intérêts et sont assujettis à ses règles générales régissant les conflits d’intérêts, y compris à celles portant sur la récusation :
Le paragraphe 6(1) interdit à tout titulaire de charge publique de prendre une décision ou de participer à la prise d’une décision dans l’exercice de sa charge s’il sait ou devrait raisonnablement savoir que, en prenant cette décision, il pourrait se trouver en situation de conflit d’intérêts.
L’article 21 dispose que le titulaire de charge publique doit se récuser concernant une discussion, une décision, un débat ou un vote, à l’égard de toute question qui pourrait le placer en situation de conflit d’intérêts.
L’article 4 de la Loi précise ce qui suit : « un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d’intérêts lorsqu’il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité de favoriser son intérêt personnel ou celui d’un parent, d’un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne ».
Les membres des tribunaux administratifs qui exercent leurs fonctions officielles à temps plein ou qui les exercent à temps partiel, mais qui reçoivent un salaire annuel et des avantages sociaux, sont considérés comme titulaires de charge publique principaux au sens de la Loi sur les conflits d'intérêts. Le paragraphe 25(1) de la Loi oblige les titulaires de charge publique principaux de faire une déclaration publique au commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique lorsqu’ils se récusent pour cause de conflit d’intérêts au sens de la Loi, dans les 60 jours suivant la récusation.
Situations pour lesquelles la récusation est indiquée
Pour qu’il y ait conflit d’intérêts au sens de la Loi sur les conflits d'intérêts, l’instance doit fournir la possibilité de favoriser des intérêts privés – ceux du membre du tribunal, d’un membre de sa famille ou d’un ami, ou ceux de toute autre personne.
La commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique Mary Dawson a donné l’interprétation suivante de la notion d’« ami » dont il est question dans la Loi : « Je ne crois pas que cette interdiction visait les personnes autres que celles qui ont un lien étroit d’amitié, un sentiment d’affection ou un lien spécial avec le titulaire de charge publique. Elle ne vise pas les connaissances d’un large cercle social et les partenaires d’affaires. » Par conséquent, les membres des tribunaux administratifs peuvent être tenus de se récuser et de faire une déclaration publique à ce propos dans les situations où ils entretiennent un lien personnel étroit avec une personne dont les intérêts privés pourraient être favorisés par l’instance administrative en question.
Pour arriver à déterminer s’ils doivent demander conseil au Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique afin de savoir s’ils sont susceptibles de se trouver en conflit d’intérêts, les membres des tribunaux administratifs peuvent se poser les questions suivantes :
Ai-je un intérêt financier personnel relativement à l’instance? Règle générale, plus le lien entre l’intérêt pécuniaire du membre et l’instance est direct, plus le risque que l’instance ait une incidence sur cet intérêt et, par conséquent, plus grande est la possibilité qu’une récusation soit indiquée. Ces situations ne sont pas toujours limpides, notamment lorsque le lien entre l’intérêt pécuniaire et l’instance est moins direct ou si l’incidence de l’instance sur les intérêts privés n’est pas évidente.
Est-ce que j’entretiens des liens étroits, personnels et constants avec des personnes ou des sociétés étroitement liées à l’instance et dont l’issue pourrait avoir une incidence sur les intérêts privés de ces personnes et sociétés? Il importe d’évaluer la nature, l’ampleur et l’actualité de ces liens afin de déterminer s’ils sont suffisamment étroits pour amener une personne raisonnable à douter de l’impartialité du membre dans des situations où l’issue de l’instance pourrait avoir une incidence sur les intérêts privés de ces personnes ou sociétés. Ces situations qui peuvent amener à une récusation ne se produisent pas seulement lorsque le membre entretient des liens intimes avec une partie à l’instance, mais aussi s’il est en rapport étroit avec quiconque a un intérêt significatif au regard de l’issue de l’instance, dont les témoins importants et les conseillers juridiques.
Les situations auxquelles les membres des tribunaux administratifs peuvent s’identifier en se posant les questions suivantes ne donnent généralement pas lieu à un conflit d’intérêts au sens de la Loi sur les conflits d'intérêts. Toutefois, ils doivent s’y montrer attentifs :
Ai-je eu un comportement susceptible de jeter le doute sur ma capacité de demeurer impartial? Un membre d’un tribunal administratif peut avoir tenu des propos ou eu un comportement, avant ou pendant l’instance, qui pourrait amener un observateur raisonnable à conclure qu’il n’est pas ou ne peut pas être impartial et qu’il n’est donc pas habilité à entendre l’affaire. À proprement parler, un comportement qui témoigne d’un manque d’impartialité ne donne pas automatiquement lieu à un conflit d’intérêts. Pour être visé par la Loi, le comportement doit créer une situation pour laquelle l’issue de l’instance fournit la possibilité de favoriser les intérêts privés du membre ou d’une personne avec qui il entretient des liens personnels, ou encore de favoriser de façon irrégulière les intérêts privés d’une autre personne.
De façon générale, la Loi sur les conflits d'intérêts oblige les membres des tribunaux administratifs à se récuser si leurs intérêts privés ou ceux d’un ami sont susceptibles d’être favorisés par l’issue de l’instance. En l’absence de tels intérêts, les récusations qui résultent d’un préjugé à l’égard de l’instance ou de déclarations ou comportements témoignant de la partialité du membre n’entraînent habituellement pas de conflit d’intérêts au sens de la Loi.
Le présent document est fourni à titre exclusivement indicatif. Nous recommandons fortement aux membres des tribunaux administratifs de communiquer avec le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique, par téléphone au 613-995-0721 ou par courriel à ciec-cciec@parl.gc.ca, pour obtenir des conseils confidentiels sur des cas particuliers.